Un titre percutant ne suffit pas à faire un bon roman et bien souvent la déception est au rendez vous. Mais dans le cas présent, bien au contraire, l'enthousiasme du départ ne faiblit pas tout au long de la lecture même si l'intrigue stagne un peu au début la deuxième partie.
Le héros commence à dézinguer à tout va les animaux domestiques du quartier dans le but de voir ses concitoyens sortir de leur individualisme et se rapprocher mutuellement dans un bel élan de solidarité. Mais bien vite, il se rend compte que les humains retombent bien vite dans leurs travers naturels, et suite à un accident mettant fin à la vie de sa concierge, il décide de mettre un terme à sa carrière de tueur d'animaux domestiques pour s'attaquer aux humains qui lui pourrissent la vie. Petit à petit, au fur à mesure de ses forfaits, le dénominateur commun de toutes ses victimes lui apparaît comme une évidence :
Elle essuya une larme et ajouta :
- Et tu sais pas ce qu'il a osé me dire ? « La disparition de Vespier nous a permis d'alléger la masse salariale. Comme ça, on a pu équilibrer le budget. » Non mais quel con, je te jure. Quel con !
- Quoi, qu'est-ce que tu as dit ? sursautai-je.
- Quoi, à propos du budget ?
- Non, après…
- Je ne sais plus, moi… Quel con ?
- Oui c'est ça ! m'exclamai-je.
- Ah ça, tu peux le dire, renchérit-elle. Le roi des cons, oui.
Je l'embrassai et sortis de son bureau sur un petit nuage.
Je savais enfin contre qui je me battais. J'avais enfin mis un nom sur un visage.
« Le con, m'écriai-je, voilà l'ennemi ! »
Suite à cette découverte fortuite, l'auteur s'en donne à cœur joie avec ce petit exercice de style autour de la syllabe « con » :
Convaincu mais confus, contrit et content à la fois, confit un peu aussi, contrarié surtout… Encore aujourd'hui, le contrecoup, le contrechoc, devrais-je dire, de cette considérable constatation me consterne. Comment n'y avais-je pas songé plus tôt ? Les cons ! Que de conjectures incongrues, que de contretemps contre-productifs et autres contrevérités malheureuses pour en arriver là ! Confondant ! Inconcevable ! Confronté à ce constat si évident, j'aurais volontiers congratulé Larivière, pour son concours concluant, et fêté de concert avec elle la consécration de mon combat. Je me consolais en pensant qu'on se confronte toujours au concret avant de comprendre le concept.
[…] Un horizon sans limites s'offrait à moi. Un continent à conquérir.
S'ensuit alors une longue série de meurtres pendant laquelle le héros traque ses nouveaux ennemis tout en cherchant à définir précisément ce qu'est véritablement un con. A un certain moment, il va même en croiser un beau spécimen en la personne du ministre de l'Environnement dont l'ambition politique n'a de limite que la Présidence de la République. Face à une menace de grippe aviaire, son discours et son comportement volontaristes finiront par l'entraîner sur la pente fatale tant sa connerie est manifeste :
- Vous en avez marre de toute cette volaille ? lança-t-il en direction de la foule. Eh bien on va vous en débarrasser ! J'ai pris la décision de faire nettoyer entièrement le village au Kärcher pour éviter tout risque potentiel.
[…]
- La République ne tolèrera aucun cas de grippe aviaire dans votre département. J'y veillerai personnellement. Il n'y aura pas d'épidémie. Je vous le garantis.
Mais l'heure approche où notre serial killer va rencontrer celui qui pourrait bien être Le Con étalon… Ceci-dit, la connerie étant un puits sans fond, sa mission ne sera pas tout à fait terminée :
Ne vous faites aucune illusion. Même prévenue, même sur les dents, la police ne pourra protéger tous les cons de France.
A la fois jubilatoire et philosophique, ce premier roman consacre assurément un nouvel écrivain que j'aurai plaisir à retrouver.
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