L'identité des droites françaises ne se définit pas uniquement par leurs modalités historiques de conquête et d'exercice du pouvoir ; elle se décline tout autant sur les cultures, c'est-à-dire, hors du domaine politique, dans l'espace social, sur les instruments et les ancrages des doctrines, des idées et des valeurs partagées. L'attachement à cette identité commune se traduit non plus obligatoirement par l'engagement militant ou l'adhésion à un parti, mais par l'achat régulier d'un quotidien, la lecture suivie d'une revue ou bien encore une préférence marquée pour une écriture particulière de l'histoire.
A l'instar de la politique, les cultures ont leurs propres structures, réseaux, vecteurs, acteurs. Leur univers est tissé par les liens que nouent notabilités politiques et élites des salons, noms de la presse et noms de l'édition, personnel politique, hommes de plume - romanciers, essayistes - et hommes de mémoire - historiens professionnels ou érudits. Cette sociabilité, porteuse et nourricière des cultures, fait circuler idées et doctrines entre les salons, les groupes parlementaires ou les ligues - et, plus tardivement, les partis -, les salles de rédaction, les grandes collections et les amphithéâtres de l'Université. Elles cristallisent particulièrement dans les batailles de mémoire qui tour à tour mobilisent mémorialistes, romanciers et historiens, doctrinaires et idéologues, militants - autour d'un parti et ses publications - et citoyens, enfin, au cours de rassemblements et de cérémonies commémoratives visant à inscrire symboliquement des systèmes de croyances et de valeurs dans l'espace public. L'identité des droites se nourrit de ce recoupement des différentes sphères du discours, de l'écrit et de la mémoire. |