Clones, robots, cyborgs, organes artificiels... : la science-fiction d'hier devient notre réalité et l'on se demande déjà comment préserver une définition de l'humain. Chez ceux que les machines fascinent, Jean-Michel BESNIER perçoit une forme de lassitude - voire de honte - d'être seulement hommes. Aux autres qui, au nous d'idéaux humanistes, refusent les progrès techniques, il reproche en revanche leur inconséquence : n'ont-ils pas cru que la liberté humaine consistait à s'arracher à la nature - ce que la technique permet d'obtenir effectivement? Les métaphysiciens de toujours souhaitent que l'Esprit triomphe de la Nature. Les visionnaires d'aujourd'hui, proclamant l'avènement du posthumain, annoncent la réalisation concrète de cette ambition. Grâce à son ingéniosité, l'homme n'aura bientôt plus le souci de naître : il s'autoproduira. II ne connaîtra plus la maladie : des nanorobots le répareront en permanence. Il ne mourra plus, sauf à effacer volontairement le contenu téléchargé de sa conscience.
Mais comment vivrons-nous dans ce monde-là? Quelle éthique nous mettra en harmonie avec une humanité élargie, capable d'inclure autant les animaux que les robots ou les cyborgs? Quels droits, par exemple, devrons-nous accorder à ces robots chargés, là où les hommes sont défaillants, de rendre nos fins de vie plus humaines? Les utopies posthumaines nous obligent à affronter ces questions, à évaluer nos dispositions à engager le dialogue avec cet autre, hier animal ou barbare, aujourd'hui machine ou cyborg. N'est-ce pas là justement, aujourd'hui comme hier, que se joue la grandeur de l'humain? |