A la fin de La Seconde Guerre mondiale, plusieurs écrivains de langue allemande, profondément traumatisés par ce conflit, ont rendu compte de leur expérience pour comprendre la réalité de cette guerre et dénoncer l'horreur dont ils avaient été témoins. Cette littérature réaliste, la Trümmerliteratur ou littérature des ruines est illustrée par les œuvres de Anna Seghers, Die Toten Bleiben jung (les mots restent jeunes), de Wolfgang Borchert, Drauben von der Tûr (Devant la porte), 1949, ou encore de Heinrich Böll, Der Zug war pünktlich (le train était à l'heure), 1949.
Rassemblés au sein du Groupe 47 créé par Hans Werner Richter, Martin Walser, Gûnter Grass, Heinrich Böll, Siegfried Lenz, entre autres, seront les représentants de cette littérature allemande d'après-guerre marquée par l'expérience, des ruines et de la douleur.
Heinrich Böll, né à Cologne le 21 décembre 1917, fut, après ses études secondaires, apprenti en librairie. La guerre interrompt sa vie pendant six années. En 1947 il publie ses premiers textes, travaille à la rédaction de nouvelles, romans, pièces radiophoniques, traductions et œuvres théâtrales qui le rendront célèbre. En 1972, Heinrich Böll obtiendra le prix Nobel de littérature. Il est mort le 16 juillet 1985.
Le récit dont nous proposons aujourd'hui l'édition bilingue - Le train était à l'heure - est le premier libre publié en Allemagne par Heïnrich Böll , en 1949. Ce récit est très fortement marqué par l'impression immédiate des souvenirs de la guerre.
L'histoire commence dans la gare d'une ville du pays de la Ruhr. Un soldat cherche une place dans un train de permissionnaires en partance pour le front.
Pour le soldat, C'est son dernier voyage. Il sait qu'il va mourir , qu'il doit mourir. Les hommes que le hasard a rassemblés la jouent aux cartes, boivent, partagent leur pain et leur bière et semblent noyer leur angoisse dans le schnaps. Andreas, le soldat, se souvient de son village, du regard d'une jeune femme, de son enfance, et il se prend à haïr tous ceux pour qui la guerre n'est que le reflet d'une mauvaise fatalité. Le train s'arrête à Lemberg, Andreas rencontre une espionne polonaise, qui se prostitue avec les soldats pour obtenir des renseignements qu'elle transmet à la résistance en Pologne. Cette jeune femme a pitié du soldat et veut le sauver. Mais la certitude d'une mort prochaine va plonger Andreas dans un état proche de la folie.
Heinrich Bôll a écrit dans ce livre une des plus belles histoires de la mort absurde. Ce court récit, rédigé dans un style réaliste concis est un plaidoyer, un des plus bouleversants réquisitoires contre toute guerre. |