Fuite dans le Grand Nord
Ayaklut, Indien Inuit accusé sans preuve du meurtre d’un policier canadien est jugé sommairement, emprisonné et bientôt pendu si les habitants de Caribou, excités en sous-main par les hommes de Fitzgerald, n’arrivent entretemps à le lyncher. Jim Brandon aura eu beau s’interposer, Ayaklut arrive à duper tout le monde et à s’enfuir, sauvant sa peau d’une justice expéditive au couperet. Le lendemain, en fin de matinée, Tex Willer, Kit Carson et le sergent Lafferty de la police montée arrivent à Caribou. Leurs chiens de traîneau les remorquent et sont chargés du cadavre du policier Ryan. Au grand dam des clients huppés de l’hôtel de la ville, les rangers débarquent en transportant le policier assassiné. L’interposition de Fitzgerald et de ses sbires face à l’intrusion se solde par une remise au pas musclée du gandin par les rangers. La vie des policiers est ensuite menacée par des tueurs nocturnes. Sachant leur ami Jim Brandon parti à la recherche d’Ayaklut poursuivi lui-même par une expédition punitive constitué des citadins de Caribou menée par les redoutables hommes de main Roscoe et Muffin, les rangers doivent tenter de les rejoindre au plus vite pour les secourir. Pendant ce temps, les deux dangereux bandits américains Bones et Pollard courent toujours.
Suite et fin d’une traque initiale incluse à une chasse à l’homme, faisant d’un innocent un ennemi, de deux fuyards des chasseurs. Mauro Boselli encastre habilement les différents tiroirs dans son scénario gigogne. Le funeste Fitzgerald se trouve à son tour malmené par les deux malfrats Bones et Pollard. Miguel Angel Repetto livre un beau travail : cadrages dynamiques, personnages expressifs, décors travaillés. Le plaisir perdure à lire une bédé populaire soignée.

Complot au Klondike
Dans les territoires du Grand Nord canadien, non loin du village esseulé de Horse Creek, par une froide journée de novembre, le caporal Patrick Ryan de la police montée, en mission avec ses chiens de traîneau croise la piste de deux bandits américains en cavale, Bones et Pollard. Pendant ce temps, au saloon tenu par le Français Loustel, le sergent Lafferty rencontre Tex Will et Kit Carson attablés. Il leur fait part de ses craintes quant au retard de son collègue alors que les rangers lui racontent les assassinats commis par la bande de desperados pourchassée et décimée à mesure de leur remontée vers le Canada.
Le récit enchâssé conçu par Mauro Boselli coulisse parfaitement entre présent de la narration dans les terres enneigées du Canada et passé proche avec les exactions commises par les sinistres bandits sur le territoire américain. En accrochant les survivants de la bande de malfrats à un affairiste local, Henry Fitzgerald, l’histoire amène naturellement les rangers vers leur ami et colonel de la police canadienne Jim Brandon, personnage récurrent de la série. Excellemment ourdie, l’aventure au Klondike complexifie une traque aléatoire sur une piste sinueuse jalonnée de morts et dessine en toile de fond une internationale du crime où les bandits se reconnaissent et s’épaulent dans un but lucratif. Retrouver le grand dessinateur argentin Miguel Angel Repetto (aujourd’hui âgé de 89 ans) dans une histoire réalisée en 2005 demeure un régal visuel constant. Son trait précis, classique, décliné en fines hachures peut rappeler le graphisme extraordinaire du dessinateur sud-américain Arturo del Castillo (1925-1992) ou l’excellentissime José Luis Salinas (1908-1985), autre talentueux dessinateur argentin à son acmée dans les années cinquante.

Cours martiale
Mandatés par le colonel Faraday de Fort Defiance bien décidé à passer l’éponge, Tex Willer et son frère de sang Tiger Jack tente de retrouver Natay mais il va rapidement paraître impossible de l’extraire de la vindicte du major Marcus Leland qui en a fait une affaire personnelle, une bête noire et une obsession.
Le terrible récit débuté dans le n° 548 trouve ici sa cruelle conclusion. Le lecteur ne peut qu’être ému par la force, le courage et la lucidité de Natay, bientôt relayé par son fils Santos. Cette histoire sombrement mélancolique, évoluant aux marges d’une civilisation vacillante et d’une justice précaire, délivre un goût durable d’amertume.

Document d’accusation
Marcus Leland a pris du galon et devenu général, il parade devant la cavalerie de Fort Defiance jusqu’au moment où Santos, scout indien de l’armée, se rue sur lui et l’abatte avant d’être neutralisé et jeté en prison. Keno, un éclaireur du fort vient informer Tex Willer de l’assassinat du général Leland. Avec son fils et ses deux compagnons, Tiger Jack et Kit Carson, le ranger se rend immédiatement sur le lieu du crime. En chemin, Tex Willer raconte comment par le passé il est venu en aide au père de Santos, Natay, un Apache poursuivi par des comancheros désireux de l’anéantir. Natay aurait assisté auparavant à l’exécution de Bannister, chef de la bande et il représente maintenant une menace pour le nouveau patron des bandits, Joe Merrick. Frustré que sa proie ne lui échappe, Merrick va tout faire pour inculper Natay du meurtre de Bannister. Pour le major Leland de Fort Defiance, que vaut la peau d’un Indien contre la parole d’un Blanc ?
Claudio Nizzi a ourdi une implacable tragédie qui semble débuter par son dénouement mais qui ne se conclura réellement qu’à la toute fin de l’aventure avec le sort réservé à Santos. Le lecteur assiste à l’inexorable glissement d’un proscrit accablé par le destin et malgré sa bravoure, sa geste héroïque, demeure seul face à l’injustice des Blancs. Andrea Venturi est un talentueux dessinateur transalpin certainement influencé par le graphisme tout en hachures énergiques de « Big » John Buscema (1927-2002), artiste américain majeur de la Marvel Comics des années 1970.