Pierre Bayard tente ici de démontrer que dans "Le chien des Baskerville", Sherlock Holmes se serait trompé en concluant que S. est le meurtrier de Sir Charles.
Une lecture que j'ai trouvé extrêmement intéressante - même si (ou parce que?) je ne suis pas du tout d'accord sur le fond!
Tout d'abord, pour moi les polars ne sont pas à prendre au pied de la lettre, mais plutôt comme de jolis contes qui me titillent l'esprit et me font m'évader du quotidien en me plongeant corps et âme dans une intrigue. Du coup, la démarche de vouloir trouver le "vrai assasin" m'a parue saugrenue (même si très intéressante). En fait, je doute qu'on puisse trouver un seul polar qui soit réaliste; la plupart doivent être des constructions de l'esprit très éloignées d'un meurtre et d'une enquête réelle... Le tout est que ce ne soit ni trop tiré par les cheveux ni trop cousu de fil blanc - mais le lecteur doit aussi faire prendre d'un peu de "bonne volonté" pour adhérer au côté imaginaire/iréel de l'histoire (ou alors lire des romans tirés d'enquêtes réelles!).
En l'occurence, Le chien des Baskerville comprend effectivement de nombreuses incohérences (à la relecture j'en avais noté deux spontanément: le chien qui ne s'approche pas et la captation de l'héritage). Mais je trouve que la solution de Pierre Bayard comprend tout autant d'incohérences, et elle ne m'a pas plus convaincue (attention spoiler):
Enfin, la partie sur le monde intermédiaire m'a parue fumeuse. Si je suis convaincue chaque lecteur crée un monde imaginaire dans sa tête à chaque lecture, je n'adhère pas aux passages de personnages de fiction d'un monde à l'autre.
En fait, je me suis demandée si ce livre-ci n'était pas à prendre au second degré, et si Pierre Bayard ne s'amuse pas avec nous. Par exemple, alors que dans un chapitre il démontre que suite à l'absence de preuves, on peut avoir des doutes au sujet de la réelle culpabilité de S., il enchaîne dans le chapitre suivant par "Comme démontré précedemment, S. est innocent". Bref, il commet exactement les mêmes erreurs que Holmes, à savoir conclure sur la base de simples hypothèses! En un mot, Pierre Bayard nous a pondu une solution tout aussi bancale que celle de Holmes, et se demande si on va gober cette nouvelle solution toute crue, ou si on va faire preuve d'esprit critique comme il nous incite à le faire... Mais faire preuve d'un esprit très critique en lisant chaque polar, cela conduit probablement à jeter à la poubelle 95% d'entre eux, et donc à arrêter d'en lire.