Voici un dictionnaire littéraire inutilisable qui laisse rêveur. Quels plaisirs de lecture pourtant ! Charles Dantzig possède une érudition digeste et un amour profond de la littérature qu’un style fluide, presque primesautier, rend immédiatement accessible. Le lecteur a envie de s’enthousiasmer et de partir à la découverte d’écrivains connus ou confidentiels. L’ivresse est dans le ton. Bien sûr, l’essayiste ne peut pas rendre la force poétique contenue dans l’œuvre d’auteurs tels Rimbaud ou Baudelaire mais ses remarques biographiques sont pertinentes, tranchantes, sans concession au bon goût ambiant. Certaines phrases m’ont fait éclater de rire. Ainsi, Marguerite Yourcenar est décrite comme un « vieux labrador enroulé dans un torchon », Marcel Aymé comme un « paysan aux yeux de varan ». De nombreuses citations bien choisies et parfois franchement désopilantes : « On est plus près du cœur quand la poitrine est plate » de Louis Bouilhet, égayent les notices qui s’étendent parfois sur plusieurs pages. La longueur des notices n’est toutefois pas proportionnelle à l’intérêt de Charles Dantzig pour l’auteur en question. Ainsi, l’entrée faite à Fernando Pessoa tient sur une page et demie mais l’auteur portugais trouve pleinement sa place dans ce dictionnaire amoureux consacré à la littérature française. Une ou deux notices du Dantzig avant de s’endormir est une excellente médication de l’âme.