Michel Cousin vit à Paris, travaille dans les statistiques et rêve d’une idylle avec Melle Dreyfus, une collègue. Mais surtout Michel Cousin souffre atrocement de solitude. Alors, pour combler le vide de son existence et à défaut de trouver l’amour chez ses contemporains, il adopte un serpent python, Gros-Câlin, capable de l’enlacer dans une puissante étreinte affectueusement. Mais élever un python de 2,20 mètres dans un 20m2 parisien n’est pas chose aisée...
Progressivement le lecteur comprend que le reptile est en fait une projection ou un prolongement de Michel Cousin lui-même. Il matérialise l’inadéquation du personnage à son environnement, sa peur de la solitude et son besoin d’affection et de liberté, son récit étant un poignant cri d’angoisse.
Ce livre repose à la fois sur l’histoire et sur le langage. En effet dès les premières lignes de ce livre-monologue inattendu Romain Gary met en garde le lecteur sur le langage employé par Michel Cousin :
«Je dois donc m’excuser de certaines mutilations, mal-emplois, sauts de carpe, entorses, refus d’obéissance, crabismes, strabismes et immigrations sauvages du langage, syntaxe et vocabulaire». Oui mais voilà, ces calembours, légers délires, mots employés pour d’autres, incorrections langagières volontaires et insensées, et autres figures de style, bien qu’ayant une vertu comique, m’ont passablement ennuyés et même agacés par leur surabondance. Honnêtement, j’ai eu du mal à finir ce récit.
Malgré cela j’ai relevé certains passages particulièrement farfelus, corrosifs, tendres ou simplement rigolots que j’ai bien apprécié et qui m’ont permis de persister et de finir la lecture de ce récit saugrenu :
«Il ne s’agit pas seulement de tirer votre épingle du jeu, mais de bouleverser tous les rapports du jeu avec des épingles.»
«Moi, j’étais ailleurs, avec mon sourire qui était content de me revoir.»
«D’ailleurs, mon problème principal n’est pas tellement mon chez-moi mais mon chez-les-autres. La rue. Ainsi qu’on l’a remarqué sans cesse dans ce texte, il y a dix millions d’usagés dans la région parisienne et on les sent bien, qui ne sont pas là, mais moi, j’ai parfois l’impression qu’ils sont cent millions qui ne sont pas là, et c’est l’angoisse, une telle quantité d’absence. J’en attrape des sueurs d’inexistence.»
«Beaucoup de gens se sentent mal dans leur peau, parce que ce n’est pas la leur.»
«Le fauteuil, surtout, m’est sympathique, avec son air décontracté, qui fume la pipe, en tweed anglais ; il semblait toujours se reposer après de longs voyages et on sentait qu’il avait beaucoup de choses à raconter.»
«L’amour est peut-être la plus belle forme du dialogue que l’homme a inventé pour se répondre à lui-même.»
«Peut-être qu’il entendait une musique intérieure formidable, avec caisses, violons et percussions et il voulait la faire écouter au monde entier dans un but de générosité, mais il faut un public, des amateurs, de l’attention, et des moyens d’expression, les gens n’aiment pas s’habiller et se déranger pour rien. C’est ce qu’on appelle, justement, de concert. La musique à l’intérieur est une chose qui a besoin d’aide extérieure, sans quoi elle fait un bruit infernal parce que personne ne l’entend.»
«Chacun de vous est entouré de millions de gens, c’est la solitude.»
«Jaime les coquelicots à cause du nom qu’ils portent, co-que-li-cots. C’est gai et il y a même là-dedans des rires d’enfants heureux.»
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Romain Gary, de son vrai nom Roman Kacew, est un romancier français d'origine russe, né le 8 mai 1914 à Vilnius (Lituanie), mort (suicide) le 2 décembre 1980 à Paris. Il a publié Gros-Câlin sous le pseudonyme d'Émile Ajar en 1974.
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