Moscou le cocotier.
La politique de la terre brûlée vieille comme la guerre est une tactique défensive qui a pleinement réussi aux Russes face au rouleau compresseur napoléonien. L’incendie de Moscou en septembre 1812 prive l’occupant français d’abri et contraint Napoléon à lever le camp le 18 octobre, hélas trop tard. Après le relâchement, c’est la Débâcle de la Grande Armée qui se profile avec la venue de l’hiver et son cortège d’horreur.
Michel Richaud a scénarisé habilement le passionnant roman de Patrick Rambaud. Le dessin fouillé et ambitieux d’Ivan Gil donne à voir avec style et fluidité la multitude en mouvement et l’expression des visages dans un même élan, des vues panoramiques aux gros plans. Les hommes semblent s’agiter sur une scène de théâtre mais la sidération et l’horreur explosent au détour des planches quand une case montre le charnier d’un champ de bataille ou la mutilation d’un soldat hébété. La découverte d’une troupe de comédiens français réfugiés dans la cave d’un palais moscovite fait écho à la tragédie en train de s’ourdir où des milliers d’hommes subjugués par un tyran mégalomane s’agitent telles des marionnettes désarticulées. La mise en couleur est soignée et participe activement à l’histoire quand les jaunes et les oranges de l’incendie inondent Moscou. Napoléon, comme Néron naguère, regarde impuissant la capitale moscovite brûler. Il se voyait faire ami-ami avec Alexandre en signant une paix avantageuse mais le tsar n’a cure des ambitions françaises. Les deux tomes suivants constituant la trilogie de la Bérézina ne peuvent qu’être captivants.
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