La comète allée avec le soleil.
En approchant Rimbaud par la périphérie, on cerne mieux l’homme, insaisissable, toujours porté ailleurs. Par son parti-pris simple mais audacieux, le romancier Jean Rouaud donne à saisir une époque, une culture, une ambiance avec un va-et-vient éclairant dans l’interprétation avisée de faits et gestes entre hier et aujourd’hui. Les courts chapitres s’enchâssent comme on sertit les pierres précieuses des vies passées dans la chevelure d’une comète interstellaire. Rimbaud reprend du lustre sous l’écriture inspirée de Rouaud. Les lieux et les hommes s’égrènent chronologiquement : Dôle et le père du poète, Roche et la mother, le grand-père maternel, le médecin de famille, Charleville, l’ami Delahaye, le professeur Izambard, les sœurs Gindre, Paul Demeny, Verlaine, la bohème parisienne, Londres, Bruxelles, Aden, Harar, Ménélik, Marseille et tant d’autres endroits et personnes illuminés par la traîne de l’astre errant. Des commentaires avisés s’intercalent quand la vie du poète prend un nouveau virage. Jean Rouaud écrit avec empathie mais aussi avec un recul bienvenu d’où l’humour pointe. L’agonie du poète, épouvantable, est évoquée avec tact et humanité. L’auteur se permet même d’exciter la curiosité des rimbaldiens depuis la dédicace sibylline jusqu’au chapitre conclusif plutôt émouvant. L’essai littéraire de Jean Rouaud est une belle réussite et se démarque de la logorrhée lourde et absconse qui se déverse en vain autour du grand poète de 17 ans.
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