Contrairement à la vulgate médiatique qui associe invariablement la conversion des femmes à l'islam à un acte contraint, souvent par le mariage, au port du niqab ou autres burqas, voire au "djihad matrimonial" en Syrie, voici le résultat d'un enquête de terrain auprès de onze femmes françaises d'origines sociales et géographiques différentes, qui restituent un parcours de conversion personnel et varié. Cette variété est emblématiquement représentée par l'usage alternatif ou conjoint du prénom de naissance ou de conversion, par le port ou non du voile, par l'adhésion à ou la critique de la laïcité "à la française", et plus généralement par un positionnement privé ou public (éventuellement politique ou associatif) de la nouvelle appartenance religieuse de chacune.
Cependant, certains traits communs apparaissent malgré les différences, qui donnent à réfléchir : les jeunes femmes sont généralement issues d'une pratique du catholicisme - et non seulement d'un héritage familial chrétien - supérieure à la moyenne nationale ; elles ont été mues par une quête de spiritualité et de communauté ; si cette dernière n'est pas toujours au rendez-vous, à cause des réticences personnelles ou institutionnelles venant des Musulmans culturels, le manque en est cruellement ressenti ; par ailleurs, l'adhésion à l'islam des néophytes prend souvent ses distances par rapport, justement, aux pratiques transmises en héritage aux descendants d'immigrés musulmans ; néanmoins, la conversion se passe dans la majorité des cas par la rencontre de croyants (par des relation amicales ou sentimentales avec des Musulmans culturels ou convertis), souvent au moment de questionnements profonds (par ex. sur la mort), et elle implique des modifications irréversibles dans les liens familiaux (ascendants et descendants), interpersonnels, sociaux et parfois politiques, ainsi que, souvent, dans le cadre de vie, privé comme professionnel. Parfois la conversion entraîne une migration. Souvent, elle implique aussi de nouvelles formes d'engagement ou de militantisme, mais non de prosélytisme. A noter également que dans la phase de quête spirituelle, l'éventualité d'une conversion au judaïsme plutôt qu'à l'islam est souvent évoquée, mais c'est la difficulté d'entrer dans la communauté juive qui les en dissuade ; suite à la conversion à l'islam, et non sans rapport avec le conflit israélo-palestinien, un certain rejet de cette dernière est souvent attesté. Enfin, la conversion est aussi souvent vécue comme une rupture que comme une continuité dans l'itinéraire biographique ; d'où une démarche de construction ou de coupure des ponts avec l'ancien environnement social.
Il s'agit là d'un recueil de nature journalistique, qui favorise une certaine aisance de lecture au détriment de la rigueur qui aurait été apportée par l'explicitation des questions posées, surtout si elles ont été toujours les mêmes, par celle des circonstances des rencontres et des entretiens, par le verbatim ou au moins des citations de bonne envergure, et enfin par la réflexion sur la méthodologie. En leur absence, nous faisons face seulement à une "galerie de portraits, et des anecdotes saisissantes qui la jalonnent".
----
[Recherchez la page de l'auteur de ce livre sur
Wikipedia]