Manga compact et dense, pesant son poids de vide post coïtum (« post-coïtale tristesse », in english), sept histoires d’intérêt variable composent la bédé de Naoki Yamamoto. La première, « Blue », donne son titre au recueil. Ses six premières pages sont en couleur ; elles sont visuellement très réussies et intrigantes à l’image du personnage féminin, allongé sur le toit de l’école, donnant la sensation d’être au bord du vide. Sur ce toit, dans le local oublié du club d’astronomie, la jeune Kutani va entraîner le non moins jeune Haino dans les jeux de l’amour libre à l’aide de pilules bleues mais c’est Kutani qui mène le bal. Elle jouit sans contrainte et use de son partenaire à sa convenance. Si l’envie la prend, elle le trompe puis le délaisse enfin, définitivement, sans autre forme de procès alors que les sentiments prenaient corps chez Haino. Des années plus tard, il erre dans la ville et se souvient mais les élans semblent brisés et le temps de la pure jouissance définitivement révolu comme absorbés dans la béance et le silence d’un ciel bleu pétrole.
Si le dessin en noir et blanc peut paraître parfois maladroit, pire, bâclé, notamment dans la restitution des expressions des visages juvéniles, le trait trouve sa pleine vigueur dans les rares mises en couleur qui lui donnent chair. Les scènes sexuelles sont récurrentes mais les sexes sont gommés. Elles s’intègrent totalement au récit et elles n’ont rien de gratuit. Elles trouvent parfois des résonances inouïes quand elles sont au diapason d’une mise en page inventive et virtuose. L’intérêt majeur tient à la découverte virginale des jeux de l’amour physique, à une innocence troublante alors que le vide menace de toute part des existences solitaires et désabusées.

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