La 'cabale des dévots' est la réponse de Revel aux critiques formulées contre 'Pourquoi des philosophes', essai dans lequel il s'interrogeait sur les fondements et le rôle d'une philosophie moderne. Les auteurs vivants cités dans cet ouvrage ainsi que les laudateurs des défunts critiqués ont tous exercé un droit de réponse auquel Revel contre-argumente à son tour.
Pour cette raison, il est préférable de lire 'Pourquoi des philosophes' avant la cabale. Pour cette raison également, la cabale intéressera sans doutes plus les lecteurs ayant une solide connaissance des philosophes français des XIX° et XX° siècles.
Le livre est en trois partie. Une longue introduction explique la genèse du livre et commence à répondre à certaines des critiques faites à 'Pourquoi des philosophes' en développant certains des thèmes abordés (notamment, la confusion entre les sciences positives et leur interprétation philosophique). Cette analyse se poursuit dans la première partie dite 'problèmes théoriques'.
La seconde partie 'problèmes pédagogiques' met le doigt sur les carences de l'enseignement en France. C'est la partie qui m'a le plus intéresse car si l'on met de côté quelques remarques un peu périmées, ce livre écrit il y a presque 50 ans (livre publié en 1962) dresse un tableau de l'éducation nationale, de la recherche et de la culture qui n'est pas éloigné des constats actuels: la recherche est sous-payée, on favorise l'éducation pratique à la culture générale, on veut créer des ingénieurs et donc on dénigre les sciences humaines...
Deux extraits :
-On refuse les moyens de travailler aux savants déjà formés, et on pense en faire surgir de nouveaux, et qui travailleront pour rien, en favorisant l'analphabétisme chez les lycéens. Tout en passe aujourd'hui comme si on se disait :"Nous n'avons peut-être pas assez d'argent pour rendre les Français forts en science, mais en attendant nous allons les rendre nuls en lettres, çà sera toujours çà."
- La bourgeoisie française ne vent pas payer la recherche, tout en se lançant dans des dépenses de pure mégalomanie, telle que la fabrication d'une bombe d'un type dépassé. Elle laisse végéter l'enseignement supérieur, seul capable, si je ne m'abuse, de former des spécialistes. Puis, pour s'excuser, elle rejette la responsabilité de notre stagnation scientifique sur l'enseignement du second degré que, du reste, on ne veut pas financer non plus.
Même si le sujet ne m'a pas passionné, j'ai retrouvé avec plaisir la méthode analytique de Revel ainsi que certaines des préoccupations récurrentes dans son œuvre : l'appauvrissement de la langue française notamment par l'emploi de mots dans un sens détourné ; l'immodestie et le nombrilisme des français (
"On n'est pas impunément le peuple le plus intelligent de la terre").
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