Depuis que notre ami Laudateur m'a mis sur la voie de Jacques Ellul, je tourne et retourne autour du grand homme en cherchant par quel ouvrage je pourrais aborder ce "continent"...et c'est d'une façon assez peu flatteuse pour mon égo, je le reconnais , que j'ai choisi la facilité d'un ouvrage au titre un peu racoleur mais qui a le mérite de collationner la majeure partie des inquiétudes que Ellul formulait à l'encontre de la technique. Ouvrage de vulgarisation,donc, et qui aborde peu l'aspect chrétien de la pensée de Ellul (mais que l'auteur ne passe cependant pas sous silence...).

Tout d'abord Jean-Luc Porquet (excellent journaliste qui écrit dans le Canard enchaîné), pose Ellul comme Le penseur de la technique. Entendons nous bien, Ellul n'est ni pour ni contre la technique, il regrette simplement qu'elle s'impose à tous et surtout aux décideurs, sans qu il y ait débat sur l'opportunité de certains choix qui peuvent engager irréversiblement ( et l'on pense bien sûr au nucléaire...).En une vingtaine de chapîtres, Jean-Luc Porquet aborde (ou plutôt survole...) tous les thèmes que Ellul a développé dans ses nombreux livres : "religion " du progrès,pouvoirs des experts,gaspillage généralisé,systèmisation de la technique,relations incestueuses entre recherche civile et militaire, entre politiques et scientifiques...Ellul est sans nul doute un"père" de l'écologie, et pas le moins radical ! C'est vrament pour moi une découverte. Et dans sa vie d'homme lambda Ellul était également digne d'admiration ; éloigné des honneurs (toujours enseignant à Bordeaux) et de la politique (une mauvaise expérience d'adjoint au maire à Pessac ! ). Et avec cela militant pour de bonnes causes comme par exemple contre " l'aménagement " de la côte aquitaine.
Alors,bien sûr, parfois il pouvait se tromper, comme lorsqu'il voyait le développement des micro-ordinateurs comme moyen de contourner l'emprise de l'état sur les citoyens... paradoxe d'un contempteur de la fuite en avant technologique ! mais d'être un visionnaire l'on n'en est pas moins homme....
Il me reste maintenant à me coltiner avec ses ouvrages, dont "Le bluff technologique" me parait emblématique. ( il serait , par extraordinaire concordance, le pendant du "Bluff éthique" de F. Schiffter que cela ne m'étonnerait pas ! ).

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J'ai une admiration sans faille pour Jean-Luc Porquet dont je lis avec jubilation tous les articles que je trouve. Ses enthousiasmes sont communicatifs. Même ses "Plouf" du Canard enchaîné qui constituent des mini synthèses de problèmes sociétaux ou écologiques souvent pessimistes donnent envie d'aller de l'avant. Ses conseils de lecture ont souvent été pour moi des sources d'émerveillement, "Don Segundo Sombra" par exemple. En revanche, je me vois mal lire Jacques Ellul même si c'est le père Porquet qui le dit. Si ta note de lecture avait été d'un fol enthousiasme, je m'y serais peut-être plongé mais tu es honnête, tu dis ta vérité, alors je continue mon petit chemin sans le grand Jacques Ellul.

Bonne semaine

Franz

Merci Amiread1 pour cette note de lecture, qui me semble très fidèle, non pas à l'oeuvre de Porquet - que je n'ai pas encore lue - mais bien à l'oeuvre d'Ellul. Je l'y retrouve là-dedans.
Le bluff technologique est un livre que j'ai lu, et c'est vrai qu'il pointe bien des choses intéressantes. Mais en le lisant, je me suis dit - peut-être à tort? - que j'aurais dû commencer par la société technicienne - que je n'ai toujours pas lu. Le bluff technologique se lit très bien sans avoir abordé la société technicienne, mais les fondements de sa pensée sur la technique se trouvent là, et permet sans doute d'appréhender le bluff technologique de manière plus profonde.

Encore merci pour cette note, ça me donne envie - le jour où j'attaquerai des livres SUR Ellul - de commencer par celui-là.

Le plus difficile va être de trouver des livres d'Ellul ! à la médiathèque de ma ville ils doivent en posséder deux ou trois...! sur internet il faut que j'aille voir....
Pour répondre à Franz, c'est avant tout l'aiguillon de la curiosité (et la "retape" que Laudateur faisait pour son "idole" ) qui m'a poussé à m'interesser à Ellul, et c'est vrai que ses préoccupations sont miennes (réfléxions sur la technique,écologie ...). Porquet dis bien qu'il y a un autre auteur qui a réfléchi sur la technique c'est Heidegger ; mais là, sincèrement je rends mon tablier....Ellul à l'avantage de la "langue claire" (du moins je le préssens ).

Rassure-toi, des livres d'Ellul, on trouve assez facilement. A Quimper, en dehors de la médiathèque, j'arrive même à en trouver dans les librairies. Pourtant, c'est Quimper!
Sinon, les sites style "ceux que tu connais déjà" en vendent. Plusieurs de ces livres ont fait l'objet de rééditions assez récentes. Donc, tu en trouveras. Le plus dur c'est de décider par lequel commencer

Oui d'autres que lui ont attaqué le problème, mais sans doute pas d'une manière aussi systématique, et - comme tu le dis fort bien - aussi accessible. Mais il faut avouer que son style est souvent - pas dans tous ses livres, ouf! - celui d'un intellectuel qui parle aux gens qui savent de quoi il parle. C'est notamment le cas de l'illusion politique, que je suis en train de lire, ou autopsie de la révolution. Je comprends pas tout.

Quand à l'idole... hahaha! tu sais me piquer! Je crois que lui n'apprécierait pas, en tout cas