Avant d'ouvrir ce petit roman (seulement 173 p.), il vaut mieux être prévenu. Thierry Di Rollo n'a pas une écriture des plus joyeuses, optimistes... On racle plutôt le glauque, le pessimisme justement, le noir, la saleté... La violence n'est pas directe, plutôt sourde, sombre. Les rares scènes de sexe sont sans amour, sans passion, ni même érotisme. Dès les deux premières lignes on est dans l'ambiance : "Les nuages sont lourds et noirs ; comme ce monde à l'agonie. J'ai froid."
On suit le voyage (initiatique ?) d'Orvil à la recherche du tueur fou de ses grands-parents. Le récit est une suite de panneaux à différentes époques plus ou moins distantes dans le temps. La narration est succinte : on nous présente les anhumains, hommes ayant migrés vers Mars et qui semblent s'acharner sur leurs cousins survivants terriens. Mais pourquoi ? Qui sont-ils vraiment ? Les animaux (plutôt africains) parlent dans la tête d'Orvil : est-ce un délire psychologique, une mutation ?... Les larges bonds de l'histoire font des pauses fugitives parfois, telle celle dans le désert auprès d'un vaisseau échoué. Je n'y vois d'autre justification littéraire que la peinture d'un contexte, un espace imaginaire de l'auteur.
La force de ce roman réside dans les nombreuses interrogations et problématiques philosophiques (sens de la vie, et surtout de la mort, condition humaine...) que le lecteur a la possibilité de s'approprier en prenant son temps. Enfin il y a aussi une écriture nerveuse, riche, sans fioriture stylistique injustifiée.
Face à une telle oeuvre, je ne serais pas surpris qu'on trouve des avis très négatifs. Pour ma part, j'y ai pris beaucoup de plaisir, en prenant mon temps, en savourant les implications du discours. Je ne m'attendais pas non plus à une partie de plaisir, mais franchement j'ai besoin régulièrement de me confronter à ce genre de SF dure, pleine de sens et de passion. Bien sûr je ne le conseillerais pas à tout lecteur, mais les amateurs du genre peuvent y trouver une certaine jouissance :)

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