Charles Jacquet est sous-secrétaire d'Etat à la Famille et à l'Education nationale et il vient d'obtenir la fermeture des maisons closes. Rentrant victorieux à la maison, il apprend que son fils de 23 ans vient de faire un enfant à sa secrétaire. Sa propre femme, Olympe (qui attendait avec philosophie d'être grand'mère, car sa fille Annie est fiancée à Jacques de Vaubricourt, futur proprétaire terrien) découvre avec stupéfaction qu'elle va donner à Annie et à Georges un petit frère ! Et quand il s'avère qu'Annie et Thérèse, la bonne, vont également enfanter, la mesure est comble.
Pour achever de fermer ses portes de sortie, il a toujours prôné en tant qu'homme politique l'augmentation des sanctions contre les avortements et fait l'apologie des familles nombreuses...
La pièce date de 1951 et j'en avais vu une version remaniée pour convenir à un public post-soixantuitard où jouait entre autres Marthe Mercadier. Le combat gagné au début de la pièce se transforme en débat perdu par Jacquet : l'avortement devient légal. Jacquet y était d'autant plus farouchement opposé qu'il ne croyait pas en avoir besoin un jour et les circonstances l'induisent alors grandement en tentation... A cet égard, et à d'autres (suppression des remarques les plus condescendantes et paternalistes à l'égard de la classe ouvrière), le remaniement est une bonne idée et met en lumière l'hypocrisie régnante dans la haute bourgeoisie où l'on a les moyens de cacher ou de transformer ses entorses aux bienséances ou aux lois en cas de force majeure, voire de souverain bien.
Malgré tout, cette dénonciation ne va pas très loin : Natacha finit par être acceptée par les Jacquet, mais parce qu'il s'avère qu'elle est de haute extraction ; les frasques d'Annie échappent à la connaissance de tous par la ruse et on applaudira un jour à la "vraie jeune fille" qui épouse quelqu'un d'un "bon milieu" ; Jacquet assume son propre enfant tardif, mais surtout parce qu'il obtient le Ministère de la Guerre et plus celui de la Famille, ce qui détournera les journalistes de "son retour de flamme".
Heureusement que l'humour, parfois assez gaulois, est assez présent pour que l'agacement que j'ai ressenti (cf. plus haut) ne domine pas. Il y a aussi des répliques qui auraient mérité de faire date. Olympe dans son rôle de grande bourgeoise ignare, contente d'elle-même et bornée, mais d'une naïveté enfantine, est désopilante.
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