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[Merci aux ambitieux de s'occuper du monde à ma place | ...]
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apo



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Posté: Dim 24 Mar 2019 20:58
MessageSujet du message: [Merci aux ambitieux de s'occuper du monde à ma place | ...]
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[Merci aux ambitieux de s'occuper du monde à ma place | Georges Picard]

Un retraité sexagénaire établi à la campagne retrouve une lettre qu'un ami de jeunesse, Martinu, lui a adressée quinze ans auparavant, et entreprend de lui répondre, dans une longue confession-bilan de sa vie vieillissante. Contrairement à Isa, son épouse journaliste engagée, le narrateur avoue qu'il coule une existence désormais éloignée de la philosophie, détachée des plaisirs du débat et même de presque toute forme de sociabilité qui l'animait jadis : une vie retirée et paresseuse, qu'il présume dissemblable de celle de son ami, et assurément méconnaissable par rapport à celle de leurs années communes. Son désengagement de la politique et de la pensée argumentative possède des traits qui par moments semblent aigris, presque atrabilaires, de vieux ronchon en colère contre le monde et deux archétypes de voisins – Jean-Foutre le raciste, et Connard Fini, le rond-de-cuir procédurier – mais par moments simplement distants, de vieux sage, dont l'admiration est sincère du caractère encore pugnace de sa femme, en même temps que d'une jeune poétesse réservée, Lydie, qui devient amie du couple. Par contre, Michel, un collègue d'Isa, loquace, optimiste à outrance, sans doute adepte de la psychologie contemporaine du bonheur, représente son antagoniste.
De divagation en digression, d'anciennes lectures en descriptions de la vie villageoise, de méditations sur les temps qui changent en réflexions sur ses propres transformations psychiques et caractérielles, le narrateur s'attarde dans un monologue adressé à cet ami peut-être à présent étranger, peut-être même décédé, en sachant que sa femme lit, et peut-être Lydie lira aussi son texte dont la rédaction, parfois interrompue, s'étend sur plusieurs mois.
Je suis familier et grand admirateur des petits livres de Picard, à la prose ciselée à l'extrême, qui se situent à un point d'intersection toujours légèrement déplacé entre la fiction, l'essai philosophique, le pamphlet et l'autobiographie. L'acuité de sa réflexion ainsi que le soin qu'il apporte à sa langue sont intacts ; cependant j'ai regretté de ne plus retrouver, cette fois, son admirable et précieuse ironie que je recherche par-dessus tout dans ses écrits.


Cit. :

« Ce que l'on appelle l'intellectualité, à ne pas confondre évidemment avec l'intelligence, vous isole de la société courante plus sûrement qu'un passé pénitentiaire. Vous êtes regardé avec plus de méfiance que d'envie. À croire que les ratiocineurs et les contemplatifs constituent une minorité tout juste tolérée, à laquelle on attribue des pouvoirs imaginaires. À Paris, on ne paraît pas s'en douter. Seuls, les populistes ont compris le parti à tirer de ce préjugé, malheureusement conforté par l'arrogance de certains intellos médiatiques. » (p. 53)

« Je t'aurai fourni un os facile à ronger, car je ne m'accroche pas à ce que j'affirme. Certains prétendraient que c'est de la lâcheté, sans comprendre qu'il existe un courage d'accepter d'avancer prudemment sur des fétus de pensées toujours à deux doigts de se dérober. Je sais que ce point de vue révulse, on n'aime pas penser modestement. Même Isa s'inquiète de ce qu'elle appelle une démission. Elle estime qu'il est malsain de ne pas se faire confiance, quitte à se planter avec les honneurs du combat. J'essaie souvent cette méthode guerrière face à des contradicteurs. Je suis aussi capable qu'un autre d'être de mauvaise foi en ne cédant sur rien. Et alors ? On ne convainc pas l'adversaire et l'on se dégoûte de jouer un rôle. Deux dupes au lieu d'une, voilà tout. » (p. 80)

« À la guerre comme à la guerre. Si l'on se met à aimer ses dissemblables comme soi-même, on se met à leur merci. Pourquoi tant d'humains détestent-ils tant d'humains ? Pour mille raisons qui se ramènent à la peur d'avoir à entrer dans les raisons des autres. Il est plus facile de simplifier. La haine a la réputation d'être harassante, surtout quand elle tourne à l'idée fixe, mais je crois, moi, qu'elle est au contraire une sorte de paresse. L'intolérance va toute seule. » (p. 139)

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