[Tex. Spécial n° 25, Vers l’Oregon | Gianluigi Bonelli ; Aurelio Galleppini]

Eddie arbore fièrement son étoile de ranger qu’il vient juste d’obtenir la veille. A la porte du saloon, il croise et accoste poliment un homme au sujet de son magnifique cheval. Pour toute réponse, le quidam dégaine son colt, abat le ranger et prend la fuite. A Austin, au quartier général, les rangers sont à cran car ils écument depuis un mois la région dans l’espoir de retrouver le criminel. Kevin Fletcher a été identifié mais il demeure introuvable. Tex Willer et Kit Carson sont sollicités afin de mettre le grappin sur le tueur responsable de dix-sept homicides sans raison apparente. Face au portrait de l’avis de recherche, Tex est dubitatif : « Ce Flechter n’a pas l’air d’un forcené… On dirait plutôt un brave garçon élevé au lait et à la tarte au miel ». L’enquête des deux partners les emmène sur tout le territoire où ils finissent par croiser un convoi de femmes escorté par une bande de loufiats, le père Glover et ses trois fils, désireux de se faire payer en nature. Le viol collectif est imminent alors les rangers entrent dans la tourmente de la ronde lubrique. Les colts font le ménage. En guise de présentation auprès des femmes rescapées et reconnaissantes, Tex dira, fort modestement : « Mon ami et moi n’avons rien fait d’extraordinaire. Eliminer la lie est notre métier. » Les femmes viennent du Kansas, un Etat vidé d’hommes par la Guerre de Sécession et elles se dirigent vers l’Oregon dans l’espoir de se construire une nouvelle vie. Elles répondent à des annonces matrimoniales émanant d’une association religieuse d’Oregon City. Le voyage est risqué et les rangers dévient de leur trajectoire initiale pour les guider une partie du parcours. Traversée de rivière meurtrière, de territoires indiens hostiles, sous des pluies diluviennes, au bord de précipices, l’arrivée à la « Mission of the Lonely Hearts » ne met pas un terme au danger mais le révérend n’est autre que le père du tueur dément et les deux font la paire, pour Tex et Kit aussi, dans leur lutte du bien contre l’esprit malin.
Une nouvelle fois, l’aventure des deux rangers est foisonnante et passionnante à suivre. Sur une trame historique, le scénariste a su broder une partition originale avec les passages obligés fort bien intégrés. Le cahier des charges est respecté haut la main. Tex Willer et Kit Carson sont des héros hiératiques que la méchanceté, la lubricité et la démence ne peuvent détourner du droit chemin, celui d’une justice expéditive tirée d’un trait de feu dans le flux de l’action. Les femmes constituent un vivier d’héroïnes dont Emma, déterminée et admirable. Le dessin de Carlos Gomez peut paraître quelquefois déroutant dans la restitution des traits du visage de Tex, parfois méconnaissable mais à mesure du déroulement de l’épopée, le trait s’affirme et prend son envol. Les passages des rapides ou au bord des précipices sont superbement rendus. L’osmose est alors complète entre les auteurs et leurs personnages de papier.

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