La Peste de Camus aurait pu avoir
Cette odeur-là ressentie par Sonallah Ibrahim. Même narration détachée du pathos, attachée à la description crue de la réalité, propre à universaliser l’individu, à rendre son destin terriblement humain. La noirceur est absolue, l’embellie rarissime. De ce court témoignage se dégage un sentiment de solitude et d’abandon. La vie d’un homme se résume à des riens qu’une écriture blanche néantise encore davantage. Ibrahim est Egyptien. Il vient de purger une peine de prison car il est communiste. Les quinze premières pages sont d’une force peu commune. L’horreur carcérale y est encore plus vive tant elle éclate entre les coutures lâches d’une narration détachée, comme en apesanteur. Ibrahim est à cette époque un écrivain qui se cherche. Admirateur d’Hemingway, il saura s’en inspirer et retenir
« l’économie de mots et l’expressivité muselée ». Rendu à la vie civile, Sonallah Ibrahim est surveillé et contrôlé ; il doit encore faire signer chaque jour un cahier par un policier qui lui rend régulièrement visite. Le moindre manquement le renverrait immanquablement en prison. Les procédures sont sommaires, presque enfantines avec une signature dans un cahier de correspondance mais elles sont aussi brutales et sans appel. Une postface éclairante de l’auteur complète le récit présenté pour la première fois dans sa version originelle non expurgée.
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