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    Répondre au sujet L'agora des livres Index du Forum » Littérature générale    
[L'oeil americain | Pierre Morency]
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Franz



Sexe: Sexe: Masculin
Inscrit le: 01 Déc 2006
Messages: 1996
Localisation: Nîmes
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Posté: Dim 29 Mar 2009 13:20
MessageSujet du message: [L'oeil americain | Pierre Morency]
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Voici vingt ans qu’un ami naturaliste m’a parlé de L’œil américain. Nous marchions dans Paris, au printemps, le nez au vent, l’œil aux aguets. J’avais gardé précieusement la référence bibliographique car dans certaines circonstances, les mots ont prises sur la réalité et cimentent la mémoire. Paru en 1989, le recueil d’entretiens radiophoniques québécois de l’ornithologue, du poète et romancier canadien Pierre Morency (né en 1942) arrive enfin sur ma table de chevet, en 2009, via la bibliothèque du Carré d’Art de Nîmes. Ah, les trésors enfouis sur les étagères dans les bibliothèques qui ont du fond ! La manne est moins épuisable que nous.
Par malheur, je débute le livre par la préface de Jean-Jacques Brochier et je tombe sur cette phrase d’une imbécillité renversante qu’un lecteur précédent a souligné de trois points d’exclamation [alors qu’un seul point d’interrogation aurait suffi mais l’art de la glose se perd] : « Je suis chasseur, il est amateur, connaisseur, contemplateur érudit de la nature, nous sommes faits pour nous entendre. Il est poète, je suis critique. » Où est le terrain d’entente entre quelqu’un qui chasse et tue par plaisir et l’observateur patient, humble et respectueux de la nature ? La mauvaise foi érigée en dogme avec la morgue qui sied ! J’ai failli lâché prise de suite mais la myriade de récits s’ensuivant et les illustrations délicates m’ont incité à poursuivre la lecture. Heureusement, Pierre Morency rattrape le coup et rectifie le tir, si c’est possible. Il définit le titre : « Avoir l’œil américain n’est-ce pas jouir de l’habilité qui nous fait entendre ce que nous écoutons, qui nous fait voir ce qui est derrière quand on regarde devant ? » L’œil rapide et scrutateur, aiguisé de clarté était probablement l’apanage des Amérindiens bien plus que des Américains, hormis quelques pionniers d’exception mais là n’est pas la question. Pierre Morency parle de la nature canadienne en fin connaisseur et le parallèle avec la vieille Europe se fait immédiatement. Seulement là où l’auteur s’installe dans « une immense batture [une prairie soumise aux marées du fleuve] chargée de joncs, de foin de mer et de riz sauvage », il ne se trouve pas cerné par une multitude de cabanes de chasse avec des tirs continus de canardouze comme par cheu nous. Quand les oies, des bernaches grises, viennent fouiller la batture, il y en a jusqu’à cent vingt mille. L’espace et le souffle ne sont pas les mêmes et on peut comprendre la jubilation de l’ornithologue à entendre les râles de Virginie et de Caroline : « des ricanements… de l’aigu au grave, nuit et jour… ». La nature est généreuse et insatiable. Les butors d’Amérique restent invisibles, « spécialistes de la marche feutrée » et l’on entend les bécassines « chevroter dans les soirs de juin ». Compère Brochier a raison de conclure sa préface en rappelant que Saint-John Perse disait de la poésie qu’elle est le mode supérieur de la connaissance. « L’œil américain est un superbe précis de connaissance poétique. »

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Auteur    Message
amiread1



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Messages: 812
Localisation: Chateaudun


Posté: Dim 05 Avr 2009 18:06
MessageSujet du message:
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Hello Franz. Mummm... je me suis délécté de ta pointe assassine à l'encontre de J-J Brochier ; l'on peut avoir été rédac en chef au Magazine littéraire et dire des conneries... Paix à son âme. D'ailleurs je suis toujours sidéré par la prétention arrogante des chasseurs à se prétendre les meilleurs défenseurs de la nature, eux les "vrais écologistes de terrain". Tellement connaisseurs de la faune qu'il ne se passe pas un mois sans qu'un de ces énergumènes ne me questionne sur le volatile qu'il vient d'appercevoir où qu'il a tué...Et vendredi dernier rebelote, un collègue voulait confirmation qi'il avait bien vu des cigognes blanches... un must car comme oiseaux identifiables même un aveugle...etc
Bon j'arrète de déverser mon fiel sur ces pauvres chasseurs, certains agoriens pourraient penser que je suis de parti pris Very Happy .
Je rebondis sur ta remarque concernant les bibliothèques qui ont du fond pour déplorer justement que les deux miennes (Chateaudun et Chartres) "sont un peu pauvres en ouvrages naturalistes, je parcours leurs étagères de long en large et je retombe invariablement sur les bouquins de Jean Marie Pelt,Nicolas Hulot où Nicolas Vannier...Mais je comprends parfaitement la quadrature du cercle que doivent résoudre les bibliothécaires. Je sais que la médiathèque de Chateaudun coûte très chère à la ville, et investir dans un bouquin de Yann Arthus Bertrand c'est le contentement de beaucoup d'abonnés . Tiens il faudrait que je leur suggère d'attribuer les fonds consacrés aux livres de chasse aux livres traitant de voyages, d'écologie,de randonnées... Je vais me faire beaucoup d'amis....
Bonne soirée Franz.


"Lorsque Dieu créa le temps,il en créa suffisamment." Proverbe irlandais.
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Commère la carpe et le Brochier, son compère
Auteur    Message
Franz



Sexe: Sexe: Masculin
Inscrit le: 01 Déc 2006
Messages: 1996
Localisation: Nîmes
Âge: 64 Lion


Posté: Lun 06 Avr 2009 12:15
MessageSujet du message: Commère la carpe et le Brochier, son compère
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"[...] L'onde était transparente ainsi qu'aux plus beaux jours ;
Ma commère la Carpe y faisait mille tours,
Avec le Brochet son compère.
Le Héron en eût fait aisément son profit :
Tous approchaient du bord ; l'oiseau n'avait qu'à prendre..."

Bonjour amiread1,

Je viens de t'écrire à propos de l'Irlande et je vois que tu me relances au sujet du Brochier, le glouton des cours d'eau. Grand fumeur atrabilaire du Magazine littéraire, le Jean-Jacques a cassé sa pipe et laissé subséquemment l'avifaune en paix mais d'autres sont là pour reprendre le flambeau et porter haut les couleurs rouge sang. Bref, je m'étais rendu compte qu'en Irlande, justement, assis sur une de ces plages miraculeusement vierge de tout cabanon, camping car, villa, marina, etc., les avocettes et les hérons s'approchaient incroyablement près de moi alors que mes 'approches' dans la baie de Somme ou les étangs de la Brenne exigeaient des silences et des camouflages à n'en plus finir. Je finissais par n'être plus qu'un roseau, à peine pensant. Là-bas, les oiseaux peu chassés, il y a trente ans en arrière, étaient incroyablement confiants. Je m'étais rendu compte alors que je randonnais, en France, dans des espaces désertés de toute vie et les quelques animaux qui avaient échappé au carnage de la saison de chasse étaient terrorisés. Marchant, je portais la peste avec moi.
Allez, je m'éloigne mais bon, je n'ai guère de sympathie pour les tueurs et je ne saurais faire d'effort pour en avoir. Attention, je parle des chasseurs ventrus de chez nous, pas des Pygmées ou des Bushmen qui chassent avec respect dans le but de se nourrir ! Là, je ne te cause pas, amiread1, car je sais que tu fais bien la différence.

Bonne semaine et à bientôt sur l'agora.

Franz
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Auteur    Message
amiread1



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Messages: 812
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Posté: Ven 10 Avr 2009 23:45
MessageSujet du message:
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Bonsoir Franz.
Cela allait de soi, j'ai justement trop de dépit d'assister à la disparition lente et inéxorable des derniers peuples cueilleurs-chasseurs pour les assimiler aux obsédés de la gâchette et du remplissage de congélateur...
Et d'avoir remué un sujet aussi peu consensuel m'a fait souvenir d'un fait qui pourrait confirmer que cent ans plus tard les "décideurs" (ou appelle les "politiques") n'ont toujours rien compris (ou pas grand chose...).
- En 1902, considérant la situation dramatique des populations de bisons (il en restait un gros millier alors que 30 ans avant ils étaient plus de 4 millions), le gouvernement des Etats unis décida de confier à...Buffalo Bill la sauvegarde des derniers bisons du parc de Yellowstone, moyennant finances bien sûr ! D'avoir presque exterminé ces ruminants pour le compte des compagnies de chemin de fer, et accessoirement réduit les indiens à la famine, lui donnait à coup sûr toute autorité sur le sujet.
Enfin pour rebondir sur l'Irlande je prépare un voyage là-bas pour ...2010. Birdwatching et randonnée évidemment, je ne devrais pas le préciser...Mais cela explique le choix de mes lectures actuelles (entre autres le Guide du routard, mais je ne vais quand même pas faire une critique dessus... quoique...). Je vais mettre ce WE une note sur un livre merveilleux de John Mac Gahern (Mémoire),je viens de le terminer. Tout dans ce livre m'a enchanté (au sens d'enchantement). C'est cette lecture qui a relancé mon désir d'aller ,enfin,marcher dans cette île que je ne connais que par ses usines et ses zones industrielles (poèsie,poèsie...).
Bonne soirée,bon week end...et bonnes pâques !
_________________
"Lorsque Dieu créa le temps il en créa suffisamment". Proverbe irlandais.
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Franz



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Posté: Sam 11 Avr 2009 14:29
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MessageDescription du sujet: L'ire est dans la lande
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Bonjour amiread1,

Comme tu parles de Buffalo Kill Bill, je connaissais ce carnage et cette récupération, j'ai envie de te citer une mort 'exemplaire' tiré d'In memoriam de Stéphane Audeguy :
"Sitting Bull, chef indien.
En entendant les détonations des coups de feu qui tuèrent Sitting Bull, un cheval gris qui lui appartenait se crut revenu au temps où il travaillait au cirque avec son maître, au sein de la troupe de Buffalo Bill. Il exécuta donc, près du cadavre de Sitting Bull, le numéro de cabrioles qu’il avait appris dans le cadre du Wild West Show. Le cheval gris ne mourut pas. Buffalo Bill le recueillit." (p. 19-20)
Je suis retourné en Irlande il y a trois ans avec l'intention de parcourir la péninsule de Dingle à pied. Ce que j'ai fait mais au passage j'ai été horrifié par le mitage des côtes du Kerry. Des habitations laides et prétentieuses ont poussé partout de façon anarchique. Le boum économique du pays a pilonné la nature. On ne peut pas dire que l'Irlandais ait souci de ses paysages. En revanche, j'ai été à nouveau 'ébloui' par les lumières et les ambiances insaisissables.
J'attends ta note de lecture.

Bonne journée.

Franz
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