Enseignant suisse spécialisé dans la théorie et l’histoire du paysage, Michael Jakob adopte une attitude critique pour tenter de définir le paysage aujourd’hui. Forgeant le mot-valise d’
« omnipaysage », il s’interroge durant 120 pages, soit le cœur de l’essai, sur la définition du paysage. L’omnipaysage est répercuté à travers des milliards d’images-paysages en circulation dans le monde contraignant et contrariant une vision personnelle d’un paysage authentique. Donné à voir par une approche cinesthésique, le paysage se révèlerait à l’individu dans sa vérité native au-delà des stéréotypes et d’un décodage conventionnel. L’auteur pose méthodiquement les concepts lui permettant de décrire, d’analyser et d’expliquer le paysage : la nature, la relation sujet-nature, les temps et la représentation du paysage, etc., ancrant sa réflexion dans des sources écrites et respectant une chronologie éclairante. Le citadin, nostalgique d’un lien rompu avec la nature et en même temps affranchi de ses contingences, développe une idée de la nature, la symbolisant et la récupérant à travers l’image :
« Ce n’est que par et dans l’image que la relation se fait… avec laquelle le sujet pourra, à l’occasion, fusionner esthétiquement.»
Le choix pertinent des peintures illustrant le propos est contrarié par une reproduction en noir et blanc suffisamment petite pour que la médiocre qualité d’impression en efface tout l’intérêt. Les notes bibliographiques recèlent bien des pistes à explorer mais il est dommage de ne pas traduire en français toutes les citations en latin, anglais, italien, allemand. Exemple puisé page 68 dans le corps du texte :
« L’arbre, le pars pro toto héroïque de la nature est le signe omniprésent de la Aufhebung de l’humain par la nature ». Si le Suisse a du coffre et chante en ioulant plusieurs langues, le pauvre Français que je suis n’a que sa langue maternelle à chérir et l’excès de polyglottisme confinant au pédantisme m’exaspère. Ces petites égratignures n’entament pourtant pas l’intelligence d’un texte concis et dense. L’auteur sait brasser habilement l’histoire et l’esthétique à une vision personnelle. Il a dû digérer bien des écrits et des images pour rendre compte relativement simplement d’une notion aussi complexe et galvaudée que l’approche et la conception du paysage entre hier et maintenant.
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