[L'epreuve du labyrinthe : entretiens avec claude-henri rocquet | Eliade/Mircea]
Un livre ancien d'entretiens entre le journaliste Claude Henri Roquet et l'historien des religions Mircéa Eliade. Bien sûr ce livre n'interressera peut-être que les lecteurs déjà sensibilisés à la pensée de Eliade ou désirant en savoir plus sur ce personnage contreversé. Personellement c'est le parcours singulier de ce roumain de l'exil,historien mais aussi romancier, qui m'a incité à lire cet ouvrage, un peu hagiographique tout de même...
Ce qui est le plus stupéfiant c'est la totale abscence dans ce livre de la période fasciste et antisémite de Eliade ; maintenant l'on sait, mais en 1978 il semble que ce sujet soit tabou. Claude Henri Roquet se garde bien de questionner le maître sur cette époque de sa vie; sûrement fût il convenu que le sujet ne sera pas abordé... et pourtant tout nous est détaillé de l'enfance de Eliade,de son voyage en Inde,de ses premieres années d'enseignement en Roumanie,de ses années portugaises (il commit un livre à la gloire de Salazar), de ses rapports avec l'intelligencia française de l'aprés guerre, de ses années américaines comme professeur à Chicago... mais rien sur ses sympathies pour Codreanu et sa Garde de Fer ni sur ses articles antisémites commis dans quelques revues roumaines. D'ailleurs il me semble que Eliade ne fit jamais amende honorable alors que Cioran s'expliqua sur sa période de sympathie fasciste-une erreur de jeunesse... admettons...
Bien sûr cela n'enlève rien à la perspicacité et au savoir encyclopédique de Eliade;ses écrits sur des sujets comme le Sacré, les mythes,l'occultisme,les croyances néolithiques...etc, et puis c'est également un romancier de tout premier plan (La nuit bengali), mais ce qui m'interesse le plus dans Eliade c'est finalement qu'il soit roumain. J'aime ce pays,ses écrivains,sa musique,ses paysages,ses habitants ; et Eliade fait partie de toute floppée d'intellectuels migrants pour lesquels la Roumanie était trop petite pour leur génie (du moins le pensaient ils) :Tristan Tzara,Panaït Istrati,Ionesco,Cioran,Eliade,Paul Celan..et combien d'autres ! Eliade connaissait parfaitement cinq langues dont le sanskrit ; son exil fait partie intégrante de son destin, c'est ce qui ressort bien de ce livre d'entretiens.
Ce qui ressort bien aussi ,c'est que les idées politiques de Eliade avant la guerre ne sont finalement pas si déconnectées de ses travaux sur les religions ; le grand regret de Eliade, au vu de ces entretiens, serait bien l'avènement de ces religions monothéistes, dont le judaïsme, qui auraient initiées " l 'Histoire". et puis toutes ces références au mythes fondateurs, à l'enracinement...mais je ne suis pas assez versé dans les écrits de notre homme pour vous en faire une éxégèse !
Je note simplement que même après la guerre les vieux démons ne l'avaient pas quitté puisqu'il semble (d'après Wikipédia), qu'il fut très proche des membres fondateurs du G.R.E.C.E ...
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