On retient souvent de Théophile Gautier l'image d'un conteur chatoyant jouant avec une nonchalance sereine des prestiges du langage. Mais Beaudelaire avait su deviner chez ce poète un don pour décrire " l'attitude mystérieuse que les objets de la création tiennent devant le regard de l'homme ". Dans l'univers fantastique de Gautier, les mortes suscitent chez les vivants un désir très charnel (La morte amoureuse, Spirite), les objets s'animent (La cafetière), les personnages s'échappent des tapisseries pour se faire amants d'un soir (Omphale), et les hallucinations se succèdent jusqu'au vertige (La pipe d'Opium, le club des hachichins)...Inspirées des sciences occultes, à l'instar des contes d'Hoffman dont Gautier fut un fervent lecteur, ces récits, parus entre 1831 et 1856, consacrent le rêve comme seconde vie, et expriment, sous leur apparente légèreté, la hantise du temps et de la mort.