D'abord écoutez-moi, si vous continuez à lire comme ça, ça va vous abîmer les yeux. On n'a qu'à simplement faire un brin de causette ", propose Edna Earle Ponder, la nièce de l'oncle Daniel, dès les premières lignes de ce roman publié en 1954 (pleine période de " la chasse aux sorcières " et du procès des époux Rosenberg). S'ensuit une longue confidence aux accents traînants du Sud, sur l'histoire de la famille Ponder (illustre à l'échelle de Clay, Mississippi) et sur sa longue déchéance. Personnage savoureux et décalé, Edna Earle raconte, tout en considérant comme parfaitement naturel ce que tout un chacun tiendrait pour pure folie. En découle un récit délicieusement suranné, absurde, tirant volontiers sur le tragique. On pense à Flannery O'Connor et bien sûr au tutélaire Faulkner.
Oncle Daniel le généreux renferme ce goût à la fois âcre et mielleux du temps qui a passé et le parfum déroutant de ce Sud qui au dire même de Welty " est un pays étrange, amphibie partout habité d'une même solitude ".